Atlantico : Smitha Rao and J.-C. Chiao, chercheurs
américains, ont fabriqué une turbine si minuscule que dix d'entre elles peuvent
tenir sur un grain de riz. Ces micro-moulins à vent seraient une source décente
d'énergie. Comment ce concept est-il réalisable ?
Gilles Berhault : Le 21e
siècle est autant celui des bouleversements climatiques que celui des
révolutions technologiques qui s’enchaînent. Il est celui de la rupture avec un
modèle ancien fondé à la fois sur l’abondance d’une ressource notamment
énergétique peu chère et la difficulté d’accès à l’information (et au savoir).
Le paradigme a changé totalement. Le modèle est aujourd’hui celui de
l’efficacité, de l’accès au partage et à la communication et surtout de la
créativité. Et c’est
bien ce qui interpelle avec ce projet de micro-moulins à vent, c’est qu’il
représente un vrai pas de côté dans l’approche. Nous ne cherchons plus une énergie
très « centralisée », avec la puissance de la multitude gérée en
autonomie.
Il n’y a pas encore d’éléments techniques permettant de dire si ce
concept pouvait fonctionner. A l’heure actuelle, on constate de nombreuses
nouveautés techniques ; de plus en plus d’idées de ce genre prennent
naissance. L’évolution est que ces communautés techniques, interconnectées, ne
viennent plus du MIT (Massachusetts Institute of Technology, ndlr) ou
d’un grand laboratoire de recherche. Mais dans le cas précis on manque
de référentiel.
L'énergie générée par ces turbines de 1,8 millimètre de large
est-elle suffisante pour recharger un téléphone portable ? Comment ça
fonctionne, concrètement ?
Nous sommes à du micro, du précis… avec un premier pas vers les technologies
embarquées dans le corps. Nous devons faire confiance à l’imagination. Et
accepter que ce qui était de l’ordre de la science fiction d’un Philip K. Dick
soit aujourd’hui de l’ordre du possible. C’est aussi cela s’inscrire dans une
démarche de développement durable.
Vu l’évolution des technologies à l’heure actuelle,
ça doit être possible de mettre en œuvre ces micro-moulins à vent. A
partir du moment où c’est une éolienne, il y a un générateur. Avec le vent,
l’aile tourne et produit de l’électricité. Pour le moment, on est dans une
logique de très grandes éoliennes qui alimentent des villages entiers. Ici, on
part dans l’excès inverse : on essaie de faire des éoliennes les plus micro
possible. Ca pose plein de questions : comment adapter ces éoliennes aux
autres sources d’énergie ? Comment en faire une énergie interopérable avec
d’autres sources ? Il est évident que ces moulins à vent ne
pourront pas seuls résoudre les problèmes. Mais ils pourront en
résoudre une partie si est inventé un générateur qui a une productivité en terme
d’énergie supérieure à ce qu’on sait faire aujourd’hui.
Peut-on encore accroître davantage la puissance énergétique de ces
micro-moulins à vent en conservant leur petite taille ?
Une autre dimension
intéressante est celle de la petitesse… Tout l’imaginaire ancien était
fondé sur le gigantisme… Ulysse affrontait les géants. Nous sommes face à tout
le contraire. Bernard Werber a écrit un livre sur les microhumains. La
technologie réduit les humains ce qui résolvent plein de problème suite à des
catastrophes industrielles ou en médecine. Et bien évidemment un micro humain
(dix fois plus petits) consomme dix fois moins la planète.
Je téléphonerais avec une baguette de pain ?!